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Photo du rédacteurThierry Raffin

Moi ça va !..Et le monde ?

Moi et le monde ? Voici une question incontournable, dès lors que l'on se situe dans la réalité conventionnelle. Si une première interrogation lorsqu'on s'engage sur la voie de la méditation est "Pourquoi méditer ?", vient souvent ensuite cette autre question en forme d'interpellation : "C'est bien beau de s'isoler tout seul dans sa tour d'ivoire pour aller bien ! et le monde dans tout cela ? on en fait quoi ?".

Méditer peut apparaître comme une fuite face à la misère du monde, voire une sorte d'indifférence au malheur du monde, une forme de repli sur soi qui confine paradoxalement à l'égoïsme. La question devient : "la méditation peut-elle guérir le monde ? peut-elle permettre à tous d'être heureux sur cette terre ?". Peut-on porter la misère du monde ? Là, c'est du lourd. A l'aide Héraclès !

Héraclès ne répond plus... Alors je me tourne à nouveau vers Frédéric Lenoir, qui cherche dans un livre à répondre à ce travail d'Hercule de "la guérison du monde". Il cherche comme la présentation de l'ouvrage l'indique à poser "les fondements philosophiques d'une sagesse pour notre temps ; une éthique de liberté et de responsabilité qui passe par la conversion de chacun d'entre nous". Bref il s'agit d'écouter et de suivre le précepte déjà défendu par Ghandi ; "Soyez le changement que vous voulez dans le monde" ; et qui nous replonge dans les propositions mêmes des écoles antiques de philosophie de "conduire sa vie selon les principes bien définis de la vie bonne".


Il s'agit donc de revenir à une toute autre manière d'appréhender la philosophie, non plus comme on la comprends souvent comme système constitué de concepts censés nous conférer une prise sur le monde, mais comme moyen pratique de vivre en harmonie avec notre nature et le Cosmos, selon les préceptes en particulier des stoïciens. C'est rompre avec une manière de penser spécifique qui s'est développée en occident avec la philosophie moderne de Descartes, mécaniste et dualiste. Rappelons que Descartes appelant au développement de la science et de la technique dans le "Discours sur la méthode" a écrit que ce serait là le moyen de " nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature. "


https://www.philolog.fr/la-science-doit-nous-rendre-comme-maitres-et-possesseurs-de-la-nature-descartes/


Si d'un certain côté on peut être satisfait des bénéfices que le "progrès" technique a pu apporter pour améliorer la vie (le confort, la santé, la diminution de la pénibilité du travail...), la contrepartie est dans le développement de l'idée que la nature, le monde est une chose, un simple gisement de ressources matérielles en oubliant sa dimension vivante que les anciens reconnaissaient au travers de cette notion de Cosmos (c'est à dire d'un tout ordonné ayant sa raison propre dont nous ne faisons que participer). Cette réïfication du monde, c'est à dire cette réduction de la conception du monde comme ordre raisonné à une simple chose concrète, a ouvert la voie à l'idéologie de la croissance, entraînant les hommes dans des pratiques consuméristes.

On comprends alors tout le travail qu'il y a à faire pour modifier notre perception du monde, car c'est aussi cette modification de nos représentations qui peut transformer la réalité de ce monde. Il convient de "changer le récit du monde" pour reprendre l'expression d'un autre artisan de la production du monde de "Demain" Cyril Dion (Film avec Mélanie Laurent) et pour dépasser notre peur de mourir qui nous confine dans des mécanismes et stratégies de défense, de combat, de domination (qui sont les modalités ordinaires-automatiques du fonctionnement de notre cerveau) et dans des pratiques de distractions (un fonctionnement un peu plus élaboré) comme il l'explique aussi dans une vidéo tout à fait intéressante sur la question de "l'effondrement planétaire".


Distractions ! Pascal parlait déjà en son temps dans ses "pensées" de divertissement :

  • "Rien n'est si insupportable à l'homme que d'être dans un plein repos, sans passions, sans affaires, sans divertissement, sans application. Il sent alors son néant, son abandon, son insuffisance, sa dépendance, son impuissance, son vide. Incontinent il sortira du fond de son âme, l'ennui, la noirceur, la tristesse, le chagrin, le dépit, le désespoir. " Pascal - Pensées



A lire cette pensée de Pascal, on peut comprendre combien la méditation peut aussi constituer une épreuve, salutaire pour soi-même et le monde. Au delà de nos réflexes défensifs et de la recherche des plaisirs immédiats, prendre conscience de notre rapport au monde permet d'y faire face et de le transformer. En comprenant et acceptant nos limites, notre finitude, nous pouvons passer d'un sentiment d'impuissance un peu effrayant face à ce qui nous parait être la misère du monde, à un sentiment de joie de la beauté et l'harmonie fondamentales du Cosmos auquel nous sommes partie prenante (et même si nous le perturbons par des actes inconsidérés).


Cette plénitude intérieure que finissent par nous révéler l'apaisement de l'esprit et la vue pénétrante peut avoir le goût de la joie. La Joie, c'est la forme que prend alors l'augmentation de notre puissance d'agir comme le rappelle le philosophe Spinoza (régulièrement convoqué ici). Cette positivité nous mets alors en état de pouvoir voir aussi tout ce qui va bien dans le monde (et qui est souvent occulté par la sinistrose médiatique), et d'être autour de nous un artisan attentif des petits bonheurs, un messager des bonnes nouvelles.


Ainsi le recueil des fruits du bien être par la méditation n'est pas une fuite du monde, mais la voie d'un juste rapport apaisé à sa compréhension et le chemin d'une pratique au quotidien qui au-delà de l'assise formelle permet de rejoindre la troupe des artisans semant un autre récit du monde dont la puissance de transformation est tout autant spirituelle et matérielle.

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