Le printemps silencieux des hommes
- Thierry Raffin
- 1 avr. 2020
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 5 avr. 2020
C’était en mars 2020 le virus arriva s’installa Le printemps était là et ne le savait pas…
C’est un texte de Sabine Parent qui circule, que je résume ainsi par ces deux vers. Il dit bien la sidération dans laquelle les cités des hommes sont entrées. Ici poésie et philosophie dialoguent.
Et vous pouvez le lire en entier ici : https://www.plume-de-poete.fr/cetait-en-mars-sabine-parent-rf-philippe-x/
Il m'inspire profondément et évoque pour moi le souvenir du premier livre sans doute qui mit en évidence la crise écologique : "Le Printemps silencieux" de Rachel Carson (1962) ; et puis cet autre livre majeur de Michel Serres "Le contrat naturel" (1990)

Tout semble comme arrêté, les cités désertées et des hommes enfermés, reclus, comme décimés en leurs lieux de vie. Les animaux « sauvages » regagnent le terrain perdu, un peu perdus cependant dans ces lieux étranges où l’herbe a depuis longtemps disparu.
Et pourtant le printemps est là et se moque de ce temps arrêté des hommes. Les fleurs éclosent dans le frimas du vent du nord qui souffle encore ces premiers jours du printemps. Puissent aussi les fleurs de la pensée humaine éclore aussi d’une nouvelle manière d’être monde.
Ces grandes villes désertées révèlent à l’objectif, au regard des photographes de nouvelles perspectives, où la culture est réduite à une nature morte. La beauté des lieux, les lumières renouvelées, l’air purifié, laissent apparaître le génie humain lorsqu’il ne s’oublie pas dans la trépidation du monde et son affairement aveugles. Dans cet arrêt sur image, les esplanades et les grands boulevards, vidés de leur mouvement accueillent la traversée triomphante du printemps, les bourgeons s’ouvrent pour parer les ramures des arbres de leurs manteaux de feuilles où s’installent le chant des oiseaux et le pépiement des nichées à venir.
Les déambulations, les passages sont interdits, surveillés, la campagne aussi est ainsi désertée du pas de l’homme, comme dans une fin du monde.

Pendant ce temps-là, les hommes sont cloîtrés, apeurés, vidés de leur vie même dans cette crainte d’une mort insidieuse. Dans leur réclusion ils gémissent leur libération, appellent, espèrent un nouveau printemps du monde.
Dans leur silence, les hommes se rappellent ainsi le chant des oiseaux. Ce souvenir peut-il résonner comme la conscience d’une extinction et la fin de l’extermination ?
Dans ce silence accablé de la cité, un retournement s’opère peut-être. Et dans cette « bifurcation de l’histoire», un nouveau « contrat naturel » appelé il y a longtemps déjà par Michel Serres résonne comme un glas, ainsi qu’il l’écrivait alors : « ou la mort ou la symbiose » .
Revenons un instant avec Michel Serres en 1990 au moment où il publie son livre, dans l'une de ses interventions ici à "Apostrophe" :

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